Complémentarité ENR/ Nucléaire : A-t-on encore besoin d’Energies Fatales Intermittentes d’ici 2040 ?

19/03/2025

1) La demande électrique augmente moins que prévu et selon un scenario tendanciel très probable, « aucune capacité supplémentaire de production électrique n'est nécessaire jusqu'en 2035Pourquoi, alors envisager 200 TWh d'énergies renouvelable » ( Académie des Sciences et DGEC). 2) Le Haut-Commissaire à l'Energie Atomique jette un pavé dans la mare concernant la complémentarité économique nucléaire/ENR et rappelle que trop d'ENR entraineront une explosion des coûts, que les ENR devraient s'effacer en cas de surproduction et qu' il est indispensable de prendre conscience de la valeur que constitue la capacité de fournir de l'électricité à toute heure et en grande quantité – et donc de prendre en compte le coût de l'incapacité des ENR à le faire. 3) Sylvestre Huet rappelle la situation actuelle : le nucléaire est à moins de 40% de puissance installée et cependant, il assure la sécurité d'alimentation et, grâce à lui, la France a atteint les objectifs de décarbonation de son électricité de 2050. Conclusion : moratoire sur l'éolien en mer !

La demande électrique augmente moins que prévu. Vers moins de 500 TWh/an  en 2035.

La question du meilleur mix énergétique et de savoir si nous avons encore besoin d'ENR d'ici à 2035-2040 avait fait l'objet d'une interpellation assez vive de l'Académie des Sciences dans son Cahier d'Acteur de la PPE 3 (CA n°37) : « si les données de la figure 1 (p.9) sont exactes, avec des besoins en électricité de 508 TWh en 2035, aucune capacité supplémentaire de production électrique ne serait alors nécessaire, la production actuelle étant suffisante ! Pourquoi, alors, envisager 200 TWh d'énergies renouvelables (EnR) supplémentaires ? CA n°37 » lien .

La DGEC elle-même, dans une note publiée le 23 octobre 2024 et qui constitue un véritable retournement, reconnaissait enfin l'évidence : « L'électrification de l'économie française pourrait s'avérer plus lente que prévu, entraînant une hausse de la consommation d'électricité moins importante qu'anticipé d'ici 2035… Ce qu'on voit, c'est qu'en termes de consommation d'électricité, on est plutôt en dessous du scénario central qu'on avait publié en 2023, qui était le 580-640 TWh par an ». En cause, la transition des véhicules vers l'électrique, le rythme d'installation des pompes à chaleur dans les bâtiments. Et surtout « le directeur de la flexibilité de RTE note un retard dans le développement de l'hydrogène, qui devait constituer le plus gros facteur de hausse de la demande d'électricité, avec une consommation de 24 TWh environ en 2030 puis de 65 TWh en 2035, contre 38 TWh par exemple pour les voitures électriques. (La demande d'électricité révisée à la baisse d'ici 2035, Montel News). (cf notre article précédent : lien 

Pour PIEBîEM la conclusion est claire : nous n'avons donc pas besoin du programme insensé de 45 GW d'éolien en mer.

Le pavé dans la mare du Haut-Commissaire à l'Energie Atomique sur l'aspect économique de la complémentarité nucléaire/ENR lien

Dans un rapport au premier ministre qui a fait quelque bruit, le Haut Commissaire à l'Energie Atomique met un pavé dans la mare en ce qui concerne la fameuse complémentarité des ENR et du nucléaire du point de vue économique ( NB pour  le point de vue sécurité, cf fil d'actu précédent lien)

« La « complémentarité » entre ENR et nucléaire repose toutefois sur un équilibre entre Energies renouvelables et nucléaire délicat à optimiser. La PPE3 est construite à partir de l'objectif européen « fit for 55 », la réduction de 55% des gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990. A cette échéance trop rapprochée pour permettre de déployer de nouvelles capacités nucléaires, la seule solution pour décarboner consiste à électrifier massivement tout en déployant des énergies renouvelables. Trop d'ENR conduiront cependant à un sous-emploi du nucléaire et à des surcoûts pour le consommateur et pour l'industrie. Ces coûts pourraient même être aggravés en cas de surproduction, si jamais la demande en électricité ne s 'avère pas aussi importante que prévue. Les raisons pour craindre un tel scénario ne manquent pas.

Les objectifs, extrêmement ambitieux, de croissance des ENR intermittentes, spécialement le photovoltaïque, devraient être revus à la baisse dans la PPE. Les ENR devraient aussi s'effacer davantage en cas de surproduction, de manière à consolider une complémentarité équilibrée entre nucléaire et ENR.

Il est indispensable de prendre conscience de la valeur que constitue la capacité de fournir de l'électricité à toute heure et en grande quantité. Cette valeur gagnerait à être estimée et intégrée dans le coût en €/MWh des différentes filières qui comprend différentes composantes essentielles. 1) – le coût de production de l'électricité elle-même, -2) le surcoût de subvention des ENR soutenues ( qui n'est pas à ajouter à la précédente, mais qui est tout de même une composante utile pour appréhender le partage des coûts et des gains entre les consommateurs, les producteurs et le contribuable) – 3) le coût des réseaux électriques à développer, qui dépendent beaucoup des filières (une grande part des besoins nouveaux sont dus au développement des ENR) -4) le surcoût des solutions de secours nécessaires aux énergies intermittentes ( moyens pilotables, moyens de flexibilité…) »

NB : donc aussi les coûts de stockage et de congestion des réseaux

En dehors des problèmes de sécurité d'une modulation profonde et fréquente du nucléaire, cf lien , le Haut Commissaire revient aussi sur les conséquences économiques de cette modulation liée au trop- plein d'ENR :« Les conséquences financières des fortes variations de puissance demandées aux centrales à l'avenir mériteront des analyses poussées par EDF, de manière à intégrer ces surcoûts dans l'analyse globale d'un mix »

Enfin il rappelle que la quasi-totalité de la chaine de valeur du nucléaire se situe en Europe, et que c'est loin d'être le cas pour les renouvelables : « Pour un même coût complet d'un système électrique, ce n'est pas la même chose de faire appel à des dispositifs fabriqués en Chine que de faire vivre une industrie nationale. Il existe donc des coûts indirects dans l'optimum d'un mix énergétique qui dépassent de très loin le strict coût de l'énergie »

Pour PIEBîEM la conclusion est claire : pour la sécurité des centrales, pour garder un coût supportable de l'électricité, il est urgent d'arrêter le programme éolien en mer qui constitue la forme la plus dispendieuse de production d'électricité, et avec les pires conséquences environnementales.

Nucléaire/ENR où en est-on aujourd'hui ? La France a atteint les objectifs de décarbonation de 2050 grâce au retour en forme du nucléaire

Dans son blog du Monde, Sylvestre Huet rappelle le panorama de la production électrique aujourd'hui en France, dont nous ne sommes généralement pas conscient. Lien 

1) Le nucléaire est à moins de 40% de puissance installée. « L'installation d'éoliennes et de panneaux photovoltaïques, soutenue par des subventions massives et l'obligation d'achat de leurs productions a diminué la part du nucléaire dans la puissance installée du système électrique hexagonal. Elle est passée depuis quelques mois sous les 40 %, avec 39,2 % du total en février ».

2) Néanmoins le nucléaire représente (en février 2025) 68% de la production électrique : « Mais c'est différent pour la production où le nucléaire représente 68 %... La production nucléaire doit toutefois être complétée pour que la demande de consommation soit satisfaite, notamment pour suivre son évolution au cours de la journée. C'est pour l'essentiel l'hydraulique qui permet ce pilotage fin de la production électrique. » Et pas les ENR fatales intermittentes sur lesquelles on ne peut absolument pas compter.

3) Décarbonation plein succès : « Avec plus de 92 % d'électricité bas-carbone la France atteint un niveau de décarbonation de son électricité qui est attendu à l'échelle mondiale... pour après 2050 »

4)Sécurité d'approvisionnement : La garantie de l'approvisionnement est en grande partie assurée par le socle nucléaire, puis l'hydraulique.

5) Énorme variabilité de l'éolien : Le maximum est de 13 683 MW le 24 février pour 24 868 MW installés et le minimum de 808 MW le 12 février. En 48h, du 22 au 24 février, la puissance chute de près de 13 000 MW à un peu plus de 2000 MW puis remonte à plus de 13 000 MW... pour rechuter à moins de 4 000 MW en quelques heures. NB : Une variabilité de dingue qui va pas s'arranger avec l'éolien en mer.

6) Enorme variabilité journalière (mais prévisible du solaire) : Le solaire fait très logiquement le yoyo...entre les heures de nuit et un maximum à la mi-journée, modulé par la couverture nuageuse qui varie entre 13 238 MW et un peu moins de 5 000 MW.

7) Le pourcentage d'ENR n'a aucune valeur comme objectif : « Il semble clair que fixer les objectifs... pour obéir à des chiffres plus politiques qu'industriels décidés à l'échelle de l'UE, ne permettra pas de viser un optimum du système électrique. »

Voilà c'est clair ! Pas besoin d'éolien en mer pour la décarbonation de l'électricité !