Enquête sur l’incident de Nantucket et les conséquences de l’industrialisation massive de la mer côtière par l’éolien en mer

06/09/2024

Résumé : Le Nantucket Magazine de septembre 2024 consacre un large et riche « investigation article » à l'incident de la pale de Nantucket. 1) L'éolien en mer, c'est l'industrialisation massive de la mer côtière ; 2) Dissimulation et minimisation des faits : inacceptable !; 3) Des processus d'homologation qui laissent pantois ! ; 4) Des circonstances relativement clémentes qui suscitent l'inquiétude ; 5) Sur la composition des pales : polyesters, autres polymères, colles et balsa ; 6) Des accords de bon voisinage léonins ; 7) Surf et éolien en mer, c'est pas très compatible !

Le Nantucket Magazine de septembre 2024 consacre un large et riche « investigation article » à l'incident de la pale de Nantucket (Nantucket Magazine, september 2024, p70 Blown Away, Vineyard Wind's turbine blade collapse rises the island, Brian Bushard)

Pour rappel, le 13 juillet 2024, la rupture d'une seule pale d'une seule éolienne de la zone industrielle éolienne de Vineyard Wind 1 a provoqué la dispersion de milliers de débris jusqu'à 50 miles le long des côtes de l'île de Nantucket, un des plus prestigieux site maritime des USA. Bilan : des milliers de débris dangereux dans le mer et sur les côtes, pêche arrêtée, plages interdite, arrêt des travaux de Vineyard 1, voir nos fils d'actu précédents, en particulier lien  ; lien 

Extraits de l'article de synthèse du Nantucket time

1) L'éolien en mer, c'est l'industrialisation massive de la mer côtière

« Un après-midi de février 2019, les dirigeants de Vineyard Wind sont venus dans la grande salle de l'Atheneum de Nantucket pour faire valoir directement aux résidents de l'île que leur projet de parc éolien de 1600000 acres au sud-ouest de l'île fournirait une énergie renouvelable propre, avec des effets visuels et environnementaux minimes sur Natucket et ses eaux.

Mais un peu plus de cinq ans plus tard, avec le projet suspendu par les fonctionnaires fédéraux, et avec des milliers de morceaux de fibre de verre et de panneaux de mousse provenant d'une lame en ruine éparpillés sur la côte sud de l'île, ces promesses d'énergie propre sonnent creux »..

« L'éolien offshore est également une industrie et c'est un exemple très malheureux de ce qui peut arriver lorsque nous industrialisons la mer à proximité de nos îles. »

NB : un avertissement à retenir en France, où les côtes rocheuses et pentues imposent de l'éolien posé proche des côtes, le comble de l'absurde étant atteint avec le parc Bretagne sud, éolien flottant … mais proche des côtes ( 19 km de Belle-ïle, une trentaine de Groix et Quiberon ce qui maximise les couts, les inconvénients et les risques.

2) Dissimulation et minimisation des faits : inacceptable !

« Le 13 juillet, Vineyard Wind a appris qu'une de ses pales s'était effondrée dans l'Atlantique. La compagnie a a informé la ville deux jours plus tard, juste au moment où des morceaux de lames commençaient à s'échouer sur les rivages. Le PDG de Vineyard Wind, Klaus Moeller, a qualifié les débris de non toxiques, bien que cela ait été remis en question »… « Attendre deux jours avant de ne pas informer les responsables de la ville de ce qui s'est passé est inacceptable »

NB : au début, Vineyard a même prétendu que la pale s'était abimée dans les profondeurs sans disperser de débris

« En moins d'une semaine, l'incident a laissé plus de 4,5 mètres cubes de mousses et environ 1,1 mètre cube de fibre de verre sur les plages de Nantucket, selon une estimation du 17 juillet. "Dire que de gros débris flottants et des fibres de verre dans l'environnement n'étaient pas nocifs était au mieux discutable (Emily Molden, directrice exécutive du Nantucket land and Water council). Notre grande préoccupation et notre grande déception ont été la minimisation immédiate initiale des dommages potentiels de la marée de débris immédiatement qualifiée par Vineyard Wind de non toxique et non nocive » pour les gens et l'environnement »

3) Des processus d'homologation qui laissent pantois ! :

« Les turbines de 850 pieds (250 mètres de haut), 14,7 mégawatts ont reçu une certification indépendante après trois ans d'essais de prototype... Mais d'autres aspects de son processus d'inspection surprennent. En 2019, GE a envoyé l'une de ses turbines Haliade X au Massachusetts Clean Energy Center Wind Technology Testing Center à Boston pour des tests rigoureux ; les turbines étant trop grandes pour l'installation, les pales ont dû être coupées»

NB : les habitants de Nantucket trouvent qu'on les a considéré comme des animaux de laboratoire… Ce sera aussi le cas pour Bretagne sud !

4) Des circonstances relativement clémentes qui suscitent l'inquiétude :

« la rupture de la pale de Vineyard Wind s'est produite lors d'une journée d'été peu venteuse, alors que les cartes météorologiques indiquaient que Nantucket faisait face à des vents entre 6 et 13 mph du sud-ouest. Comparez cela à un ouragan de catégorie 1 (74-95 mph) ou à un ouragan de catégorie 3 (11-229 mph) ! »

5) Sur la composition des pales : polyesters, polymères, colle et balsa

« Les pales elles-mêmes sont constituées de près d'une douzaine de matériaux. Plus de 64 % du poids de chaque pale est en fibre de verre, qui comprend une résine de polyester... Les pales contiennent également des plaques de carbone, un adhésif (colle vinylester GT60), du bois de balsa et des mousses... Bien que la fabrication des pales ne comprenne aucun matériau contenant les produits chimiques éternels connus sous le nom de PFAS (perfluoroalkyles, substances chimiques très persistantes), le rapport trouve 200 additifs dont certains contenant du PTFE considéré comme un type de PFAS. ? »

NB : Au passage on apprend que le balsa, par sa légèreté et sa résistance, semble rester incontournable pour ces pales de forte puissance. Tant pis pour la déforestation en Amazonie. Lien

D'autre part, compte-tenu des enjeux environnementaux et de santé publique, PIEBÎEM demande la transparence sur les matériaux utilisés par les fabricants.

6) Des accords de bon voisinage léonins

« Alors que Vineyard Wind recherchait son financement et une approbation fédérale, les responsables de la ville ont signé en 2020 un soi-disant accord de « bon voisinage »... Selon cet accord ni Vineyard Wind ni ses sociétés affiliées ne seront tenues responsables de tout défaut de réception du financement, si elle abandonne le projet, ou de tout « dommage consécutif ou punitif, qu'il soit prévisible ou non. » Une semaine après la défaillance de la pale, le conseil d'administration de Nantucket a déclaré qu'il renégocierait les termes des accords... Nous n'avons pas les mains complètement liées….»

7) Surf et éolien en mer, c'est pas très compatible !

Les autorités municipales ont fermé toutes les plages de South Shores le lendemain de leur annonce de l'effondrement. Le propriétaire de l'école de surf ACK, Gaven Norton, a déclaré qu'après l'échouage des débris sur le rivage, les clients ont commencé à annuler. « J'ai 25 employés qui ont maintenant du mal à gérer leur argent parce qu'ils ne peuvent pas enseigner. Cela ruine mon entreprise à court terme, et qui sait maintenant combien de temps cela va durer. »

NB : Avis à Surfrider, très fan de l'éolien en mer