Éolien flottant: Wind Europe prévient que le prix de l’AO5 n’est pas une référence

27/06/2024

AO5 à 86,45 €/MW.h, ce modèle pour l'éolien en mer flottant, vantaient les ministres Le Maire, Lescure,.. Mais là, c'est le lobby même de l'éolien qui leur répond : ce ne peut pas être une référence et ça coûtera beaucoup plus cher que 86€/MWh. Le coût de raccordement, les câbles, la sous-station sont prises en charge par RTE, le choix technologique est très risqué et oblige pratiquement à recourir à des turbines étrangères. Tout ça pour un parc à 17 km de Belle-île et moins de 30 lm de Groix et Quiberon qui cumule en fait les inconvénients de l'éolien posé et du flottant.

AO5, ce modèle pour l'éolien en mer flottant, disaient les ministres...

Suite à l'attribution quelque peu rocambolesque de AO5, nous avions eu droit à ces déclarations ministérielles triomphantes : 

Bruno Le Maire : « Pennavel, la société créée par le consortium d'Elicio et de BayWa r.e., ce nouvel acteur dans l'éolien en mer en France a été désignée lauréate …Avec un tarif d'achat attribué à 86,45 €/MW.h, la filière éolienne en mer n' a plus à montrer sa compétitivité… »

Roland Lescure : « Nous pouvons être fiers, la France prend résolument le virage de l'éolien en mer… »

Hervé Berville : « C'est un choix d'avenir qui démontre que la France est à l'avant-garde de l'éolien flottant » Lien .

Sur l'attribution de AO5, voir nos fils d'actus précédents : lien1  ; lien 2  ; lien 3  ; lien 4

Et bien, c'est le lobby éolien lui-même un peu inquiet qui se charge de rétablir la vérité… enfin une certaine vérité

«Les gouvernements européens ne doivent pas s'y tromper, cette vente aux enchères était unique»

Pour Wind Europe, « l'offre sélectionnée pour le développement d'un parc éolien flottant de 250MW au large de la Bretagne Sud (AO5) ne constitue pas une référence au niveau européen. L'offre gagnante a été attribuée mi- mai par le gouvernement français à 86€/MWh à un consortium associant Elicio et BayWar.e »

« Il est trop tôt pour dire quelle sera la fourchette de prix de l'éolien flottant à grande échelle en Europe», a indiqué l'association européenne de l'éolien mardi 18 juin. À l'heure actuelle, l'Europe dispose seulement de 208 MW d'énergie éolienne flottante en exploitation, répartis principalement dans quatre petits parcs éoliens… Les prix de l'éolien flottant vont varier considérablement à travers l'Europe d'un pays à l'autre mais aussi d'un site à l'autre. »

« Cet appel d'offres français était unique à bien des égards, relève WindEurope. Comme c'est la norme en France, les promoteurs du projet n'ont pas à payer pour le raccordement au réseau, ni pour les câbles d'exportation3, ni pour la sous-station offshore. C'est RTE qui est en charge du déploiement de ces équipements. Ensuite, les conditions du site étaient extrêmement bonnes, avec des vents forts et des profondeurs d'eau favorables. Troisièmement, le contrat sur différence (CfD) proposé est fortement indexé sur l'inflation, en tenant compte des différents prix des matières premières »

« Ainsi le prix réel payé lors de la construction du parc éolien sera supérieur à 86€/MWh. »

«Les gouvernements européen ne doivent pas s'y tromper, cette vente aux enchères était unique», conclut Wind Europe. Dans l'appel d'offres Bretagne Sud, le critère prix représentait 75% de l 'évaluation totale des différentes offres. 5% reposaient sur la solidité des dispositions contractuelles et financières, qui a fait l'objet de critique de la part de la CRE quant à sa robustesse. Les 20% restants ont été déterminés par des critères d'attribution liés au développement social et territorial ainsi qu'à la protection de l'environnement et à la durabilité. »

WindEurope souligne que les enchères de Bretagne Sud ont encouragé les enchérisseurs à construire leur projet avec le moins de turbines possible. Cela a poussé les soumissionnaires à planifier leurs projets avec des éoliennes de 20MW et plus, des éoliennes qui n'existent pas sur le marché actuel. Cela augmente le risque du projet. Et le risque que les soumissionnaires soient obligés d'opter pour des turbines non européennes»,

Enfin Wind Europe prévient : « Ne prenez pas comme référence le prix de l'offre à 86€/MW.h, vous pourriez vous retrouvez dans une situation similaire à celle du Royaume-Uni l'année dernière »- (c'est-à-dire zéro réponse à l'appel d'offre).

Comme nous l'avions souligné, ce tarif de 86/MWh apparait totalement irréaliste pour de l'éolien flottant quand on voit les parcs pilotes en méditerranée demander 320 euros le MW.h et  les appels d'offres pour l'éolien flottant en Grande Bretagne à environ 205 €/MWh – sans réponse à ce jour.

Donc les professionnels eux-mêmes de l'éolien flottant confirment ce que nous disions sur AO5 : ça coûtera beaucoup plus cher que 86€/MWh, le cout de raccordement, les câbles, la sous-station sont prises en charge par RTE, le choix technologique est très risqué et oblige pratiquement à recourir à des turbines étrangères. Tout ça pour un parc à 17 km de Belle-île et moins de 30 de Groix et Quiberon, qui cumule donc les inconvénients de l'éolien posé ( défiguration des paysages, menaces sur la biodiversité et la pêche) et de l'éolien flottant ( immaturité technologique et coûts extravagants)

Ce qui finalement constitue une bonne nouvelle : une telle absurdité n'a aucun sens et il y a une chance pas négligeable que ce parc ne voie jamais le jour.

Liens le prix en Bretagne n'est pas un point de repère, lien 2 WindEurope tacle le résultat de l'appel d'offres éolien flottant en Bretagne sud lien 3 French auction results are not the new benchmark for floating wind in Europe. Et rappel sur le rapport de la CRE lien

Le problème des sous-stations

Les sous-stations sont à la charge de RTE et représentent un défi technologique et un coût extrêmement important. Selon Rystad Energy, 137 sous-stations seront installées au large de l'Europe continentale au cours de cette décennie, ce qui pourrait représenter un investissement total de 20 milliards de dollars. Plus de 120 de ces installations seront installées entre 2024 et 2030 pour un coût d'environ 18 milliards de dollars….Ainsi, les dépenses annuelles, consacrées aux sous-stations offshore, augmenteront régulièrement jusqu'en 2030, passant d'une moyenne de 1,4 milliard de dollars par an entre 2015 et 2023, pour atteindre un nouveau sommet de 8,4 milliards de dollars en 2030.

Et pour les éoliennes flottantes, la technologie n'est pas mûre (pas avant 2040 expliquait RTE) et le coût , encore inconnu, sera à coup sûr beaucoup plus élevé. Les éoliennes flottantes sont situées loin des côtes, et, rappelle Rystad certains des concepts de fondations de sous-stations qui seront utilisés en 2025 et 2026 ne sont pas encore connus,

Qu'en France, et en France seulement, le gestionnaire de réseau prenne à sa charge les sous-stations, c'est donc un cadeau aux promoteurs éoliens d'une valeur inestimable… que paieront les contribuables et les industriels. Lien