Eolien offshore aux USA : Biden pousse les derniers feux, Trump décrète un moratoire temporaire.
L'administration Biden a approuvé in extremis une zone éolienne offshore géante (2,4 GW) dans le New-Jersey - et Engie y gagne beaucoup !; comme elle s'y était engagée, l'administration Trump décrète un moratoire provisoire sur tout nouveau projet éolien offshore, au nom de l'efficacité économique, de la protection de la vie marine et de la préservation de la pêche pour les générations futures ; le décret ne concerne pas les projets approuvés qui pourront faire l'objet d'un examen juridique spécial. Le principal lobby éolien a eu une réaction modérée considérant le moratoire comme une occasion de réévaluation et de débat. Et en France, on continue avec des décrets de la DGEC ?
Approbation in extremis par l'administration Biden de la zone industrielle éolienne géante South Coast (2,4 GW, 140 éoliennes)
Le Bureau of Ocean Energy Management (BOEM), l'agence du ministère de l'Intérieur américain responsable de la gestion du développement des ressources offshore dans les eaux fédérales, a annoncé le 17 janvier avoir donné l'approbation finale pour le projet éolien South Coast.
Onzième champ commercial approuvé aux Etats-Unis, ce parc de 2.4 GW est porté par Ocean Winds, la coentreprise réunissant le français Engie et le portugais EDP Renewables. Il comptera jusqu'à 141 éoliennes et cinq postes électriques en mer au large à environ 26 milles nautiques (nm) au sud de Martha's Vineyard et à 20 nm au sud de Nantucket, dans le Massachusetts. Elizabeth Klein, directrice du BOEM a déclaré « Sous l'administration Biden-Harris, nous avons réalisé des avancées remarquables dans la promotion d'une économie des énergies propres, notamment en approuvant plus de 19 GW d'énergie éolienne en mer. »
Quelle urgence y avait-il à approuver cette zone éolienne à forte proximité de l'un des littoraux les plus beaux et les plus touristiques de la côte Atlantique, un littoral déjà confronté aux pollutions industrielles du parc industriel Vineyard Wind (60 éoliennes)et de sa rupture de pale lien .- lesquelles pales devront toutes être remplacées ?
Quelle est la puissance du lobby éolien auprès de certains politiques pour obtenir une telle décision promulguée le dernier jour de travail de l'administration Biden, juste avant l'investiture du nouveau président Donald Trump, lundi 20 janvier ? lien Mer et Marine ; lien Energies de la Mer
La seule urgence était pour Engie et EDP : faute de ce décret in extremis, la valeur de leur bail risquait de tomber à zéro !
L'administration Trump décrète un moratoire réversible et temporaire sur l'éolien en mer incapable "de fournir une énergie à faible coût à ses citoyens" et pour "maintenir une industrie de la pêche robuste pour les générations futures"
Comme il l'avait annoncé, Trump a signé dès les premières heures de son mandat un décret imposant de fait un moratoire sur la construction de nouveaux parcs éoliens offshore en utilisant la loi sur le plateau continental (OCSLA Offshore Continental Shelf Land Act- loi sur les Terres extracôtières du plateau continental)
Extraits du décret lien : Retrait temporaire de toutes les zones du plateau continental extérieur de la concession d'éoliennes offshore et examen des pratiques de concession et de délivrance de permis du gouvernement fédéral pour les projets éoliens.
"Conformément aux principes de gestion publique responsable qui sont confiés à ce bureau, en tenant dûment compte de divers facteurs pertinents, y compris la nécessité de favoriser une économie énergétique capable de répondre à la demande croissante d'énergie fiable du pays, l'importance de la vie marine, les impacts sur les courants océaniques et les régimes de vent, les effets sur les coûts de l'énergie pour les Américains – en particulier de ceux qui y sont le plus exposé– et de veiller à ce que les États-Unis soient en mesure de afin de maintenir une industrie de la pêche robuste pour les générations futures et de fournir une énergie à faible coût à ses citoyens, j'ordonne par la présente ce qui suit:
En vertu de l'autorité qui m'est accordée par l'article 12(a) de la loi sur les terres du plateau continental extérieur, 43 USC 1341(a), je retire par la présente de la disposition pour la location d'énergie éolienne toutes les zones situées dans le plateau continental extracôtier (OCS) tel que défini à l'article 2 de la loi sur les terres du plateau continental extérieur... Ce retrait entrera en vigueur à compter du 21 janvier 2025 et restera en vigueur jusqu'à la révocation du présent mémorandum présidentiel.
Ce retrait empêche temporairement l'examen de toute zone de l'OCS (plateau continental extracôtier), pour toute nouvelle location ou renouvellement de bail d'énergie éolienne à des fins de production d'électricité ou de toute autre utilisation dérivée de l'utilisation du vent. Ce retrait ne s'applique pas aux locations liées à d'autres fins telles que, mais sans s'y limiter, le pétrole, le gaz, les minéraux et la conservation de l'environnement.
Rien dans ce retrait n'affecte les droits découlant des baux existants dans les zones retirées des appels d'offre. En ce qui concerne ces baux existants, le secrétaire de l'Intérieur, en consultation avec le procureur général si nécessaire, procédera à un examen complet de la nécessité écologique, économique et environnementale de résilier ou de modifier tout bail d'énergie éolienne existant, en identifiant les bases juridiques d'une telle résiliation, et soumettra un rapport contenant des recommandations au président, par l'intermédiaire de l'assistant du président pour la politique économique. »
Conséquences et premières réactions : enfin il y aura débat sur l'éolien offshore !
Le retrait du plateau continental des enchères de baux offshore (NB, oui, aux USA, les promoteurs éoliens doivent payer pour l'utilisation de l'espace maritime et l'acceptent tout à fait) est présenté par l'administration Trump comme provisoire. Le Président peut y mettre fin à tout moment, ainsi que le Congrès par une loi ou la Cour Suprême sur appel judiciaire.
En ce qui concerne les baux existants, le décret n'a aucun effet et les bases juridiques permettant une résiliation sont incertaines, mais seront étudiées - trop tard sans doute pour les côtes du New-Jersey qui resteront sacrifiées !
Le secrétaire à l'Intérieur Doug Burgum, nommé par Trump, a indiqué que les projets existants autorisés par la loi pourraient se poursuivre, mais a exprimé son scepticisme quant à la viabilité économique de nombreuses initiatives éoliennes.
Le lobby éolien a commencé à réagir en rappelant que lors de son premier mandat, Trump avait accordé les premiers baux éoliens offshore et ont insisté sur les milliers d'emplois menacés, 1,8 milliards de commandes compromis profitant à une chaine de valeur implantée y compris dans certains Etats républicains. Bref, la bataille et le chantage commencent – ne sont jamais mentionnés les emplois perdus.
A noter la position finalement assez modérée du principal lobby de l'éolien offshore, l'OMSA ( Offshore Marine Service Association) qui considère le décret de l'administration Trump comme « une occasion cruciale de réévaluer l'orientation du secteur » et une occasion de répondre aux inquiétudes concernant la dépendance excessive à l'égard de sociétés étrangères, des navires étrangers et des marins étrangers »
Bref, les Américains auront peut-être droit à un véritable débat sur l'éolien offshore, jusqu'ici poursuivi à marche forcée sans véritable concertation et malgré les oppositions de plus en plus fortes ; un véritable débat où seront pesés intérêt climatique, impacts environnementaux, bilan et soutenabilité économique… Et en France ? On continue à fonctionner avec des décrets de la DGEC ( Direction générale de l'Energie et du Climat), ignorant superbement les contributions purement consultatives de la Commission Nationale du Débat Public et les travaux des commission Parlementaires.
En France PIEBîEM soutient un moratoire immédiat sur Bretagne sud et son raccordement et un moratoire général sur l'éolien en mer, peu adapté à la géographie des côtes françaises et sans intérêt climatique ou électrique dans sa situation énergétique .





