Quand Energies de la Mer a aussi de gros doutes sur AO5, et plus généralement l’éolien flottant

Après l'annonce triomphale par Bruno Le Maire et Roland Lescure de l'attribution d'AO5 à un tarif à deux chiffres qui doit démontrer la compétitivité de la filière, les doutes augmentent sur la réalisation même du projet. S'il se faisait, ce seraient très probablement des turbines chinoises, un choix qu'a déjà fait l'Allemagne

Dans notre CP du 3 juillet 2024 ( Le candidat retenu pour AO5 (Parc éolien en mer de Bretagne-Sud) a-t-il satisfait à ses obligations concernant le dépôt de garantie ? PIEBÎEM demande la transparence) lien  , nous exprimions nos doutes sur la réalisation même du projet AO5. Ces doutes semblent maintenant assez partagés par le périodique spécialisé Energies de la Mer qui a récemment publié deux articles critiques sur l'éolien en mer et mentionnant spécifiquement AO5.

SYNENERGY 2024 : Droit d'inventaire avant moratoire :lien 

Extraits : "Côté développeur, le marché français fut décrit comme étant très sain par un intervenant, contredit quelques minutes plus tard par son confrère qui mis en évidence les conséquences négatives possibles, voire probables de projets remportés à des prix trop bas. Le micro-climat français pourrait-il engendrer des orages futurs avec abandon de projets, comme on l'a vu sur d'autres marchés ? …"

"Les propos sur les évolutions des critères d'appel d'offre ont été par contre plus convergents sans toutefois être unanimes…S'il ya consensus sur le transfert en obligations de base de critères notés qui ne sont pas discriminants et sur le renforcement des critères sur la robustesse de l'offre, les points de vue sur l'élimination des offres anormalement basses sont moins consensuels. Un des intervenants a fait remarquer que sur l'AO5 ( Bretagne Sud), l'offre la moins chère était inférieure de 35% à la moyenne des 5 autres offres remises, et que la 2ème, celle du lauréat, était 25% inférieure à la moyenne des 4 autres offres supérieures, et de militer pour une élimination automatique des offres anormalement basse sur la base d'une méthode basée sur l'écart-type."

"En l'espèce, il relève que la CRE n'a pas attribué les points relatifs à la crédibilité des CAPEX et des puissances des turbines au lauréat, ce qui aurait pu logiquement conduire à l'écarter"

Donc acte et confirmation de ce que nous disions : l'attribution de AO5 dans les circonstances pourtant vantées par les ministres Le Maire et Lescure a été une mascarade à but politiques, basée sur un processus opaque et le déni des réalités lien 1 ; 

Le projet Bretagne sud mené par Pennavel pourrait même ne pas se faire..

Dans un second article du 7 juillet la filière de l'éolien flottant en Méditerranée s'inquiète pour son avenir,( lien ), Energies de la Mer prévoit un avenir très incertain pour AO5

Extraits : « Depuis plusieurs mois, les difficultés s'accumulent pour l'ensemble des acteurs de l'éolien flottant en Méditerranée. Les différents projets de fermes pilotes Eolmed, EFGL (Eoliennes flottantes du Golfe du Lion) et PGL ( Provence Grand Large, déjà installées mais non raccordées au réseau) et se heurtent à une série d'obstacles. Au point que certains commencent à s'interroger sur l'avenir de cette filière émergente qui a portant suscité de grands espoirs et mobilisé beaucoup d'efforts… »

« Aujourd'hui, beaucoup espèrent une rallonge de l'Etat, l'émergence d'une nouvelle filière industrielle constituant une priorité stratégique et un « investissement d'avenir ». Les développeurs concernés par les trois fermes pilotes semblent estimer que, si le prix de 220 €/MWh avait suivi l'inflation, l'équilibre financier de la filière serait assuré Mais, dans un contexte de très fortes contraintes budgétaires et au vu de la situation politique, le soutien des pouvoirs publics parait loin d'être assuré"

Et le meilleurs est sur AO5 ( Bretagne Sud) : « Avec les tarifs auxquels a été attribué AO5, il ne faut pas se faire d'illusions :il sera très difficile de fabriquer en France ». Selon plusieurs articles parus récemment dans la presse française, le projet Bretagne sud mené par Pennavel pourrait même ne pas se faire, compte-tenu d'un tarif trop bas. « Mais à ce niveau de prix, on pourrait très bien recourir à du made in China, avec seulement un assemblage en France, remarque la même source »

Faut-il le préciser : PIEBîEM , opposé à l'éolien en mer, et tout particulièrement au projet Bretagne sud , ce projet absurde qui cumule les inconvénients de l'éolien posé ( proximité des côtes, conflits d'usage, notamment avec la pêche) et de l'éolien flottant ( immaturité technique, coûts extravagants) voit ainsi ses analyses confortées et delande plus que jamais l'arrêt du projet.

Ce n('est pas vraiment une surprise : lien vers le rapport de la CRE

Et l'Allemagne choisit les turbines chinoises... lien

« L'industrie européenne des turbines éoliennes a critiqué mercredi un accord portant sur la fourniture de turbines fabriquées en Chine pour un projet offshore en mer du Nord, estimant qu'il représentait une menace pour les infrastructures essentielles de l'Allemagne. Dans le cadre de l'accord conclu entre le gestionnaire d'actifs allemand Luxcara et le groupe chinois Ming Yang, ce dernier fournira 16 turbines d'une capacité maximale de 18,5 MW chacune, dont l'installation est prévue pour 2028.

Cet accord intervient alors que la Commission européenne a demandé en avril des informations dans le cadre d'un examen préliminaire concernant d'éventuelles distorsions du marché par les fabricants chinois d'éoliennes dans cinq pays de l'Union européenne, une décision que la Chine a qualifiée de "discriminatoire". Luxcara a déclaré avoir signé l'accord à l'issue d'un appel d'offres international et d'un vaste exercice de diligence raisonnable portant sur la chaîne d'approvisionnement, la conformité environnementale, sociale et de gouvernance alignée sur la taxonomie de l'UE et la cybersécurité.

" L'équipe Waterkant a examiné en profondeur les offres de turbines reçues en réponse à un appel d'offres international lancé fin 2023 " NB : Waterkant est un projet situé en en mer du Nord d'une capacité de plus de 270 mégawatts, à environ 90 kilomètres au large de l'île de Borkum. Il devrait entrer en service en 2028."

Rappelons qu'en effet créer une filière française et européenne de l'éolien flottant, comme le réclament les lobbyistes du secteur revient à faire pleuvoir des milliards de subventions sur un secteur industriel qui ne sera pas compétitif et ne pourra vendre une seule turbine hors de l'Union Européenne et à lui accorder une rente de situation au détriment des industriels et des consommateurs qui devront payer leur électricité très cher, pour un programme éolien en mer largement inutile en France et une électricité variable intermittente qui ne convient pas aux nécessités de la réindustrialisation.