Salon mondial de l’éolien flottant (FOWT 2025, Brest) : une atmosphère crépusculaire ?

01/05/2025

Ceux qui s'attendaient à l'annonce d'un avenir radieux lors de cet événement mondial auront été très déçus. En France même, à cause des coûts et incertitudes technologiques, l'avenir de l'éolien flottant est de plus en plus problématique. Pour Pennavel (Bretagne Sud), les nouvelles sont mauvaises d'où qu'elles viennent et les doutes s'accumulent sur tous les points (impact environnemental, technologie, difficulté du projet ). Toutes les promesses sur le contenu local des appels d'offre sont démenties ; la Région Bretagne veut disputer la taxe éolienne aux communes et il est de plus en plus clair que les pêcheurs n'en profiteront pas ; coût d'aménagements des ports : aucune transparence, qui paira et combien ? L'éolien flottant, même expérimental, est à la peine.

1) "L'enthousiasme est redescendu dans l'éolien en mer en général"

Le grand raout mondial de l'éolien flottant FOWT (Floatting Offshore Wind turbines) 2025 s'est tenu à Brest du 23 au 25 avril 2025, et les édiles bretons qui s'attendaient à l'annonce d'un avenir radieux ont dû être très déçus. D'abord par ce qui s'est dit au salon lui-même et ensuite par les rumeurs insistantes selon lesquelles le gouvernement français, dans la future PPE, rebuté par les incertitudes technologiques et les coûts de l'éolien flottant reviendrait sur les conclusions de la Mer en débat et imposerait davantage d'éolien posé…ce qui va poser de très très gros problèmes d'acceptabilité. Beaucoup de problèmes donc et peu de solutions. Pour Pennavel (Bretagne Sud) , les nouvelles sont mauvaises d'où qu'elles viennent :

Le media Green Univers qu'on ne peut pas accuser de parti-pris antiéolien , dans un article intitulé les coulisses du FOWT a dévoilé un climat nettement moins triomphal qu'annoncé. Extraits lien

Green Univers : « Si l'enthousiasme est redescendu dans l'éolien en mer en général et en particulier autour de ces technologies moins matures que le posé, la filière continue à travailler à la concrétisation des premiers projets commerciaux et à revendiquer sa place dans le mix énergétique français européen »

Traduction PIEBÎEM : ça rame sévèrement dans l'éolien flottant et le lobby éolien se mobilise pour ne pas couler .

2) Et d'abord Pennavel : Les nouvelles sur Pennavel sont mauvaises , d'où qu'elles viennent...

Green Univers : « Nous cherchons à travailler en priorité avec nos partenaires historiques européens mais nous ne fermons aucune porte indique Christopher Perrin directeur technique du projet Pennavel détenu à 50/ 50 par BayWa.r.e et Elicio ; l'équipe travaille actuellement pour obtenir les autorisations environnementales avec dépôt des demandes de permis prévues à l'automne,  des campagnes de mesures sont en cours pour affiner le positionnement des éoliennes vis-à-vis des coraux présents sur le fond marin »

Traduction PIEBîEM : Ces bancs de coraux des mers froides, habitats uniques et exceptionnels par leur densité et leur beauté et protégés, que mes ancres et câbles dynamiques vont venir racler, ça m'embête vraiment ! (lien ) ; Et il n' a pas que ça, y compris dans la zone du raccordement : les bancs de maërl, les herbiers de zostère et leurs richesses extraordinaires en terme de nourriceries de poissons, crustacés lien ; Et ce n'est pas tout, il y a encore les pennatules et leurs terriers de langoustine ( 45 millions estimés dans la zone), et les vasières à haploops, nourriceries exceptionnelles – les densités les plus élevées au monde ! lien : C''est une catastrophe !

Green Univers : « Le choix d'investissement le choix des équipements utilisé devra être finalisé d'ici 2 ans en vue d'une discussion d'une décision finale d'investissement en 2029. Pour l'instant, le cas de base avec flotteur en béton et ancre à enfouissement et turbine de 23,3 mégawatts restent inchangés souligne Christophe Perrin »

Traduction PIEBîEM : On s'est engagé sur ces fichues éoliennes pour gagner l'appel d'offre, pour l'instant elles n'existent pas et personne ne sait les construire. En fait, on sait pas trop ce qu'on va faire ! La CRE (Commission de Régulation de l'Energie) avait pourtant prévenu dans son autocritique de l'appel d'offre AO5 :« développeurs « n'escomptant pas de freins technologiques pour poursuivre la montée en puissance des machines » ; « des études internes considérant que l'augmentation de la puissance et des dimensions des turbines se poursuivra linéairement sans limite technologique. » lien 

Green Univers : « Je comprends que ça puisse paraître surprenant de ne pas être candidat avec BayWa.r.e pour l'extension du projet qui sera alloué dans l' AO9 mais ce sont deux projets séparés pointe le dirigeant (Christophe Perrin) »

Traduction PIEBîEM : Personne n'a voulu recandidater avec nous, c'est un peu comme si on sentait le soufre. Et ces deux projets prétendument séparés (250MW pour A05, 500MW pour AO9) sont en fait accolés l'un à l'autre ; alors les accorder à deux exploitants séparés, c'est aller tout droit dans les disputes d'effets de sillage et de vols de vent. Ca va être compliqué !

Green Univers : « Certains espèrent que le projet flottant Méditerranée se concrétise avant celui en Bretagne pour rassurer sur l'avenir du secteur pointe un connaisseur de cette industrie. La crainte est que le projet Pennavel ne puisse finalement sortir avec les caractéristiques annoncées du fait de la complexité du site alors que la Méditerranée bénéficie d'une ressource en vent légèrement meilleure et de fonds marins également plus favorable »

Traduction PIEBîEM : Mais enfin, pourquoi on s'est lancé dans ce projet industriel éolien flottant, mais près des côtes, dans l'un des secteurs les plus difficiles, avec des impacts paysagers et écologiques majeurs et des conflits majeurs d'intérêt avec la pêche artisanale, le tourisme… Et avec une technique pas mature, et sans retour d'expérience de parcs pilotes. ( NB : En Méditerranée, pour leurs trois projets pilotes éoliens flottants différents, EDF, Engie et Qair ont demandé une augmentation des 240 €/MWh initialement prévus à 370 €/MWh). Lien  Pour soulager Pennavel, PIEBÎEM leur suggère : laissez tomber !

3) Contenu local des appels d'offres , il n'y aura rien : la Commission européenne s'y oppose et les promoteurs n'en veulent pas

Green Univers : Marc Ferracci : nous finalisons nos discussions avec la Commission européenne au sujet des critères hors-prix à inclure dans le cahier des charges de l'appel d'offre prévu pour mi 2025… Hermine Durant (sous-directrice du système électrique et des énergies renouvelables à Bercy.) : ces critères concerneront entre autres la diversification des approvisionnements et le contenu carbone des projets »… « Benoîte Chenu (Directrice des projets AO6 et AO9 pour EDF renouvelables) exhorte aussi à ne pas isoler le marché français dans le cadre de l'application du Net Zéro Industrial Act en imposant des contraintes trop spécifiques sur l'approvisionnement de certains composants.  Le marché hexagonal ne va représenter que 10- 15% du marché européen et il est important qu'il ait accès aux chaînes de valeur d'autres pays. »

Et le coup final qui tue : « Eolink (NB au large du Croisic) prévoit de mettre à l'eau son démonstrateur d'éoliennes flottantes en 2027. Tous les composants fabriqués pour la plupart en Chine sont stockés sur le port de Brest »

Traduction PIEBîEM : 1) Comme nous l'avons annoncé, la Commission Européenne s'opposera à tout critère de préférence locale dans les appels d'offre  lien ; 2) D' ailleurs, les promoteurs éoliens, y compris EDF renouvelables, n'en veulent pas ; 3) C'est déjà trop tard !

4) Taxe éolienne : les grandes disputes commencent, les communes et les pêcheurs spoliés

Green Univers : « Daniel Cueff, vice-président de la région Bretagne en charge de la mer et du littoral et Christophe Manas conseiller énergie de la région Occitanie demandent une meilleure répartition de la taxe sur l'éolien en mer. Ils souhaitent en particulier que la part destinée aux communes d'où les éoliennes sont visibles (50% du total) aille plutôt vers les acteurs qui investissent dans le secteur, les Régions elles-mêmes ou d'autres." Ben voyons!

« Si une part des recettes issues de cette taxe est réservée à la pêche, ils rappellent que la réglementation européenne ne permet pas au secteur de l'utiliser pour investir dans de nouveaux bateaux. La Commission européenne craint que cela ne renforce leur capacité de pêche ce qui aurait des effets délétères sur la ressource halieutique »

Traduction PIEBîEM : La région Bretagne a très envie de spolier les communes littorales de leur taxe éolienne (laquelle, rappelons-le peut être modifiée par simple décret, voire disparaître…). Nous souhaitons bonne chance aux maires qui tenteront, lors des prochaines municipales , d'expliquer à leurs électeurs qu'ils doivent renoncer à l'infini horizon des vues marines pour une vue sur zone industrielle, au profit d'une taxe éolienne de plus en plus incertaine. Les pêcheurs lésés ne verront jamais la taxe éolienne, sauf peut-être s'ils renoncent à leur activité : apparemment, pas question de l'utiliser pour moderniser et éventuellement décarboner leurs bateaux. A faire savoir !

5) Coût d'aménagements des ports : aucune transparence, qui paiera et combien ?

Green Univers : Hermine Durant (sous-directrice du système électrique et des énergies renouvelables à Bercy) : les résultats de l'appel à projets de l'ADEME pour soutenir le développement des ports pour l'éolien flottant devraient être connus cet été. Les lauréats se partageront 180 millions d'euros. Cet appel à projets va dans la bonne direction mais pour nous il n'est pas suffisant affirme Benoîte Chenu directrice des projets pour EDF renouvelables. Il est nécessaire de réserver des capacités portuaires pour la réalisation de ces projets ajoute-t-elle, sachant que EDF renouvelable a dû faire face à des conflits d'usage lors de la construction du projet pilote de Provence grand large »

Traduction PIEBîEM : En ce qui concerne les coûts d'aménagement des ports pour l'éolien flottant, c'est une boite noire totale. PIEBÎEM dénonce le manque de transparence sur le coût, qui devrait être intégré dans le calcul des coûts totaux de l'éolien flottant, et le manque de transparence sur qui paira ( les collectivités locales ?). Au surplus, vu les incertitudes sur l'éolien flottant, les risques de coûts échoués sont énormes .

6) L'éolien flottant, même expérimental, est à la peine

Green Univers« Le directeur général de la fondation OPEN-C Bernard Alessandrini quittera son poste le 30 avril suite à des différents avec son conseil d'administration. Des problèmes de gestion et des conflits internes sont évoqués. La fondation qui regroupe les différents sites d'essais pour les énergies marines en France doit faire évoluer celui baptisé Mistral en Méditerranée ; elle n'a pas obtenu l'autorisation d'y installer des éoliennes flottantes. Il ne sera pas un site raccordé au réseau mais permettra tout de même d'effectuer des tests par exemple pour des bouées de mesure"

« Faute de revenus dans un marché qui tarde à décoller il ne reste plus grand chose du développeur espagnol BlueFloat spécialiste dans l'éolien flottant. Le directeur de l'activité en France, Clément Mochet, annonce son départ qui survient après celui du fondateur de l'entreprise Carlos Martin Rivals,  les équipes se réduisent. Dans l'Hexagone BlueFloat s'était positionné sur l'appel d'offres en Bretagne sud et en Méditerranée sans aller jusqu'au bout »

Traduction PIEBÎEM : Mistral interdit par le préfet de tester des éoliennes flottantes, on le savait depuis novembre 2024 lien  Apparemment, la crise s'est aggravée. Requiem pour BlueFloat, il y en aura d'autres. La situation de l'éolien offshore est mauvaise aux USA, en Norvège, au Danemark, au Royaume-Uni, où les appels d'offres sont soit annulés, soit très partiellement remplis, soit carrément improductifs ( Danemark pour 6 GW d'éolien en mer en 2024) cf lien . D'où leur acharnement à vouloir se refaire en France- au détriment des consommateurs privés et industriels et des contribuables.